Analyse de jurisprudence : exigences techniques et notion de similarité

C.E., n° 256.774 du 14 juin 2023

 

Les spécifications techniques constituent-elles des exigences minimales et leur non-respect entraîne-t-il l’irrégularité de l’offre ?

Le CE s’est penché sur cette question dans une affaire opposant la société RADAR à l’Etat (CE n°256.774 du 14.06.2023). Il s’agit d’un marché public ayant pour objet l’acquisition de ceinturions et de holsters pour la police pour lequel la requérante a vu son offre rejetée car elle ne répondait pas à certaines spécifications techniques.

La partie requérante conteste que les spécifications techniques constituent des exigences minimales car le pouvoir adjudicateur ne l’a pas précisé dans le CSC.

Le CE a rappelé que « Hormis les hypothèses où les documents du marché indiquent expressément qu'il s'agit d'une exigence minimale ou substantielle, une disposition a ce caractère lorsque son auteur a voulu lui attacher une telle portée, notamment parce que sa méconnaissance éventuelle peut avoir pour effet de porter atteinte à l'égalité de traitement entre les soumissionnaires, d'affecter la comparabilité des offres, de modifier le classement de celles-ci ou de compromettre la bonne exécution du marché ».

En l’espèce, le CE a considéré que : « (…) s’agissant, en particulier, d’un marché qui a pour objet la fourniture de matériels liés à l’utilisation d’armes à feu, le pouvoir adjudicateur a pu considérer, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, que les exigences liées à l’emploi de ce matériel revêtent nécessairement un caractère essentiel, leur méconnaissance rendant inexistant, incomplet ou incertain l’engagement du soumissionnaire à exécuter le marché dans les conditions prévues ». 

Le CE rejette le recours.

 

C.E., n°254.856 du 24 octobre 2022

 

Que faut-il entendre par « similaire » dans un critère de sélection ?

Le CE s’est penché sur cette question dans un arrêt opposant la SA Etablissements G.D.A à la Ville de Charleroi (CE n°254.856 du 24 octobre 2022). Il s’agit d’un marché de fourniture et de maintenance de camion pour le curage des avaloirs, pour lequel a été érigé en critère de sélection la livraison de 5 véhicules similaires sur les trois dernières années. La SA Etablissements G.D.A a fourni une liste de balayeuses pour démontrer sa capacité technique. La Ville de Charleroi a considéré que les références qui ne portaient pas sur des véhicules ayant pour fonction principale le curage des avaloirs ne pouvaient être prises en considération et a donc écarté l’offre de la société G.D.A.

La partie requérante fait valoir que la Ville de Charleroi ne respecte pas la condition de similarité en écartant son offre. En estimant que les références remises par la société G.D.A ne correspondent pas aux véhicules indiqués dans l’objet du marché, le PA confond la similarité d’une fourniture avec son identité.

Le CE rappelle que, même si les critères de sélection sont établis de manière discrétionnaire par le pouvoir adjudicateur, il lui appartient de les formuler en des termes compréhensibles pour que le principe d’égalité soit respecté.

En l’espèce, le CE considère que le pouvoir adjudicateur n’exigeait pas une liste de cinq références de livraisons de véhicules de curage des avaloirs, mais bien de véhicules « similaires » (et non identiques). Et que, même si une balayeuse n’est pas un véhicule similaire à un véhicule de curage des avaloirs, le libellé du critère de sélection pouvait induire en erreur les soumissionnaires.

Le CE annule la décision du collège communal de Charleroi.

 

 

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